Dans mon œuvre contemporaine, je contribue activement à l’essor de l’art phygital. Ce champ artistique, caractérisé par la fusion de la matière et de l’information dans des créations uniques, est au cœur de ma démarche.
Nous voilà dans un monde où les dilemmes de choix semblent obsolètes, un monde qui prétend nous offrir systématiquement le meilleur choix pour nous-mêmes. À première vue, cela pourrait paraître libérateur : ne plus être pris au piège des aléas, ne plus subir les conséquences d’un choix malavisé.
De plus, elles nous récompensent. Elles nous donnent des likes, de l’argent pour mieux le dépenser, et du temps en plus, pour nous divertir.
Cela je le refuse. Je ne suis pas contre “l’algori”, parlé par la machine, mais je pense ce cette langue a été détournée pour nous faire vivre le pire (ou le meilleure pour ceux qui souhaitent se divertir et vivre une vie lissée)
Ma démarche artistique a toujours été nourrie par cette fascination pour les chiffres et les technologies que j’utilise, mais il ne peut pas y avoir que l’algori comme langage.
Mon travail quotidien vise à proposer d’autres choix, (en parlant l’algori, car ce n’est plus que ce que nous comprenons de nos jours)
Tous comme les Machines, je vais me nourrir d’informations, que le public me communique. Cette information, doit être fabriquée, mais la démarche doit être simplifiée en accord avec les Machines, afin de laisser du temps au divertissement. J’ai créé pour cela des clics poétiques, à utiliser. A chaque clic, de la matière phygitale est créée (de l’information physique) qui va me permettre de travailler. C’est un matériaux rare, de nos jours, car il est issu d’un autre choix
Cette toute petite déviation de vie, cette alternative poétique, qui va me permettre de créer, n’est pas sans rappeler le concept de clinamen, cette idée fascinante qu’une infime déviation dans le cours normal des choses peut engendrer un changement majeur. Cela résonne profondément en moi, tant en tant qu’artiste qu’en tant qu’observateur du monde. Dans le clinamen, je trouve une métaphore puissante pour l’acte créatif lui-même – un moment où, par un léger mouvement, une pensée ou une expression, la trajectoire habituelle de la perception et de la réalité peut être altérée.
Le clinamen incarne pour moi l’essence de la spontanéité et de la surprise qui manque à l’algori.
Il représente cette étincelle imprévisible qui transforme l’ordinaire en extraordinaire, le quotidien en quelque chose de magique. C’est dans ces moments de déviation inattendue que je trouve l’essence la plus pure de la créativité.
En intégrant le clinamen dans ma démarche artistique, je cherche à vous faire rater votre train, pour votre bien.
L’homme qui file
Clinamen
J’offre le clinamen comme une option alternative, une voie différente à explorer. Je le rends accessible au public, invitant chacun à expérimenter des ‘clics’ poétiques qui servent de point de départ pour une divergence. Chaque clic est une invitation à dévier du chemin habituel, à quitter une norme pour en découvrir une autre. Le résultat de ces déviations se manifeste à travers mes œuvres – que ce soit sous forme de peintures, de photographies ou de sculptures phygitales. Ces créations sont les témoins tangibles d’une volonté délibérée de créer un changement, de provoquer un ‘autre chose’. Elles incarnent le passage d’un état conventionnel à un état transformé.
Arsen Eca dans son atelier – Quotidien d’atelier réalisé par S. Mortier.
Cependant, dans un tournant inattendu et révélateur de sa démarche artistique, il met en pause son processus créatif. Cette interruption n’est pas un acte anodin, mais une réponse délibérée à une sollicitation extérieure : une demande de “Sommeil” émanant d’un simple clic.
Arsen Eca et le Mythe du Clic Sisyphe
Arsen Eca, artiste avant-gardiste, explore dans son œuvre la relation symbiotique entre l’humain et le digital, s’inscrivant dans une démarche qu’il qualifie de “phygitale”. Son projet, au croisement de l’art génératif et de l’intelligence artificielle, questionne la nature même de notre interaction avec le monde numérique.
La réinterprétation contemporaine du mythe de Sisyphe par Arsen Eca se matérialise à travers le concept du “clic sisypheen”. Dans cette métaphore moderne, le rocher de Sisyphe est remplacé par l’action répétitive et souvent vaine du clic, symbolisant la quête incessante et inassouvie de sens dans un univers dominé par des algorithmes implacables. Ces algorithmes, tels des dieux capricieux de l’ère numérique, dictent et redéfinissent constamment les règles du jeu, entrainant l’utilisateur dans une boucle infinie de désirs insatisfaits.
Le travail d’Arsen Eca est une critique poignante de la dictature algorithmique, où chaque clic est un effort vers un but sans cesse dérobé, une quête de signification dans un océan d’informations superficielles. À l’instar de Sisyphe condamné à son éternel recommencement, l’artiste dépeint l’utilisateur d’Internet comme un acteur tragique, engagé dans une lutte absurde contre les forces invisibles qui manipulent ses actions.
Dans l’approche artistique innovante d’Arsen Eca, le clic de l’utilisateur est métaphoriquement assimilé à l’action d’un ouvrier alimentant une machine avec du charbon. Cependant, dans ce contexte numérique et artistique, ce n’est pas du charbon qui est versé dans la machine, mais des données – des informations précieuses qui sont consommées et exploitées par les systèmes numériques pour leurs propres fins.
Cette comparaison met en exergue la dualité de notre interaction avec la technologie : d’une part, nous jouons un rôle actif, presque ouvrier, fournissant en continu les ressources (données, informations) nécessaires au fonctionnement de ces systèmes. D’autre part, il y a une dimension presque exploitative dans cette interaction, où le système utilise ces données à son avantage, souvent sans que l’utilisateur en soit pleinement conscient.
Cette onde électromagnétique devient ainsi une métaphore puissante de la façon dont les systèmes numériques récompensent et conditionnent nos comportements. Elle reflète le cycle de rétroaction instantanée qui caractérise notre ère numérique, où chaque action est suivie d’une réaction immédiate, créant un cercle de dépendance et d’engagement continu.